28‏/2‏/2010

Algérie : Méthodes curatives ancestrales pour combattre le venin



Naama - Des habitants nomades et des régions éparses de Naama continuent, pour se prémunir contre les morsures mortelles des scorpions, à recourir à des méthodes curatives qui ne font toujours l'unanimité.


Algérie : Méthodes curatives ancestrales pour combattre le venin
Occupant des vastes étendues de la wilaya de Naama, lieu de prolifération du scorpion, ils n'hésitent pas à recourir à l'utilisation de produits prophylactiques et curatifs traditionnels, parfois voués à l'échec, pour le traitement des piqûres mortels de cet insecte.

Entre-autres méthodes thérapeutiques préconisées par les bédouins du sud de la wilaya, le recours à "Hadjra Souda" (pierre noire) comme pansement contre la piqûre scorpionnique et aux plantes médicinales à l'instar du "Remth" (Arthrophytum scoparium) et "El Heltit" (ferula communis ou ferula assa-foetida) la férule commune, à la quelle on attribue un rô le de désintoxication en cas de morsure.


D'autres régions de Naama recourent au traitement, toujours par la médecine dite alternative, par l'utilisation d'une mixture de beurre pur de cheptel ajouté aux plantes de thym (Zaatar) et de la genévrière (Arâar), dont les âpres goûts empêchent la circulation du venin, ainsi que l'utilisation du gaz butane sur le lieu de la morsure pour la coagulation du venin. Toutefois, cette dernière méthode s'avère parfois inopérante une fois la température normale du corps redevenue stationnaire, selon des spécialistes.


Ces plantes sont disponibles grâce à la cueillette effectuée par des horticulteurs et aux vendeurs ambulants, fortement sollicités par bon nombre de citoyens des régions enclavées en quête de "potions magiques" pour se prémunir contre le venin scorpionnique.


El Hadj Mohamed El Gourari, originaire de Tiout, 88 km au sud-est du chef lieu de la wilaya de Naama, a signalé, pour sa part, que des villageois, victimes de morsures scorponniques, se sont rendus aux "Tolba" (enseignants coraniques), Chouyoukh des zaouïas pour une guérison par "Rokia" (exorcisions), une méthode, soutient-il, qui a, à moult reprises, leur a permis de se "relever" d'une morsure scorpionnique. La lecture de versets coraniques suffit, renchérit El Hadj El Gourari, pour "débarrasser" la victime du venin.


De son coté, Benyamina, éleveur et herboriste ambulant de la région d'Asla, a évoqué les "vertus" de l'usage d'animaux prédateurs, dont l'hérisson, pour lutter contre la prolifération de l'insecte venimeux.


Pour le Dr Ghafari El Mejdoub, spécialiste en toxicologie, le recours à ce genre de guérison traditionnelle est aléatoire. Selon lui, l'utilisation des plantes médicinales dans le traitement de l'envenimation scorpionnique n'est pas à l'abris du danger. "Cette culture ancestrale de traitement n'est pas une conséquence de laboratoires d'analyses, elle constitue un patrimoine immatériel oral qui peut, en mauvais usage, avoir des effets secondaires et des complications parfois mortelles", a-t-il prévenu.

Le Dr Ghafari a ajouté que certains extraits de plantes sont jugés inefficaces, en ce sens, a-t-il expliqué, que chaque partie de la plante (racine, tige et feuilles), peut laisser des séquelles dommageables, dont l'insuffisance rénale et l'hypertension artérielle.,

Tout en imputant le recours à ces procédés à de "fausses données médicales répondues dans les sociétés", il a appelé les populations concernées à se rapprocher, en cas d'envenimation, des structures sanitaires pour une prise en charge "efficiente".


Entre temps, les services de la médecine préventive au niveau des structures hospitalières de proximité s'attellent à l'intensification des campagnes de vulgarisation et de sensibilisation sur la salubrité de l'environnement, parallèlement aux opérations de collecte de cet insecte.


Ces campagnes, renforcées par l'épandage d'insecticides et de pesticides dans lieux réputés traditionnellement comme étant les plus fréquentés par les scorpions, ont donné des résultats jugés probants .C'est ainsi qu'un recul de 25% du nombre de victimes d'envenimation scorpionnique a été enregistré en 2008, comparativement à l'année précédente.


Pour accompagner cette tendance à la réduction du nombre des victimes, l'initiative de l'Institut Pasteur consistant en le couplage du scorpion noir, très répandu dans la région, avec l'autre espèce jaune, a concouru a atténuer l'effet du venin de l'insecte "hybride" né de ce couplage.


La généralisation de l'électrification publique a également repoussé quelque peu la prolifération de cet insecte photophobe dans ces régions enclavées dont des jeunes habitants participent régulièrement aux opérations de collecte de l'insecte.


Initiées par la direction de l'emploi au titre du dispositif des travaux d'utilité publique à haute intensité de main d'œuvre (TUP-HIMO), ces opérations de collecte menées à travers les autres wilayas du sud ont sensiblement réduit la prolifération du scorpion.


Un bilan de la direction de la santé fait état de 1.300 morsures annuelles relevées notamment durant la période des grandes chaleurs au sud de la wilaya (Tiout, Asla et Ain Sefra), signalant que la prise en charge médicale d'un cas d'envenimation scorpionnique coûtait en moyenne 15.000 DA.


Pour faire face à de nouveaux cas, les mêmes services ont réservé quelque 2.800 doses de sérum pour prendre en charge d'éventuelles morsures.