
Evoquer la localité de Moghrar, dans la wilaya de Naâma, à  une soixantaine de kilomètres de Aïn Sefra en ces temps de canicule,  cela paraît aller à contresens de la notion touristique et de la  recherche de la fraîcheur. Certes, d’un point de vue général, il serait  difficile d’admettre un séjour dans cette région durant l’été. Mais  détrompez-vous, les oasis de Moghrar Foukani et Tahtani sont reliées par  un important cours d’eau, l'oued Namous
A partir de cet ensemble édifiant formé par la verdure, les palmeraies  et les vergers, d’une part, et l’eau à profusion, d’autre part, nous  pouvons construire notre séjour fait de beauté de la nature et de  vestiges fascinants. C'est également un lieu de halte de nombreux  oiseaux migrateurs qui traversent la Méditerranée et le Sahara. En  effet, les localités de Moghrar, chef-lieu de daïra et Moghrar Tahtani  que l’on appelle désormais Kalaâ Bouamama, situées sur les flancs des  montagnes des ksour, recèlent d'importantes ressources et potentialités  dans le domaine du tourisme.   A Moghrar, la visite du ksar, vieux de quelques siècles, vous transporte  dans le lointain mode de vie de nos ancêtres. Une ingéniosité dont  l’architecture faisait de ce lieu un espace conviviale où il faisait bon  vivre et où le voisinage était source de respect, de protection et de  soutien social. Même les placettes, bien centrées et situées autour de  fontaines, renseignent sur l’état d’esprit de cette communauté qui  plaçait la vie collective au-dessus de tout. Tout s’entrecroise. Les  dédales des ruelles vous feront découvrir les systèmes de ventilation,  ainsi que le savoir-faire défensif en cas d’attaque d’ennemis. Dans la  partie basse du ksar, se dresse le minaret de la mosquée. A l’entrée,  une espèce de balcon s’ouvre sur l’oued et les vergers de grenadiers,  orangers et pruniers. Les palmiers d’où pendent les régimes de dattes  d'excellente qualité «fegggous» et «aghrass» affirment l’identité  saharienne. Si le thermomètre affiche plus de trente degrés à  l’extérieur, dans la salle d’eau située au sous-sol, la fraîcheur règne.  Une salamandre vous fixe des yeux, le lieu est mystique.   
La restauration pour préserver la mémoire   Des dalles disposées en cercle offrent un espace de repos où on peut  même s’étendre et bénéficier des bienfaits de la rivière et de son eau  douce et froide qui jaillie d’une source.     Les habitants ne sont pas nombreux, d’ailleurs à Moghrar, on compte  autour de 2,08 habitants au km2. Ce qui est surprenant aussi, c’est que  la population, surtout les vieux et vieilles, parlent le berbère, plus  précisément le «chleuh». Nous saurons que le ksar a fini de vivre en  1975, quand il fut évacué par la plupart de ses habitants. Les vendeurs  de produits alimentaires, les coiffeurs et les artisans ont fermé leurs  boutiques. Depuis, le ksar n’a pas fini de tomber en désuétude. Une  opération de restauration des murs, de l’extérieur seulement, ne peut  être considérée comme une opération de sauvetage d’un patrimoine très  important pour notre histoire. A l’intérieur, c’est un spectacle de  ruines. L’abandon est total. Le maire, Ziane El Bachir, qui nous  accompagnait, semblait peiné devant un tel décor, lui qui voulait une  restauration totale, faite par des spécialistes, pour lancer un tourisme  rural en collaboration avec les propriétaires des habitations.   
Oasis, histoire, légende et découverte  Ce ksar, qui a connu des péripéties de révoltes et de combats, des  moments de fêtes et de joie, ne peut disparaître par la seule passivité  humaine ou par les intempéries, comme celles de 2007, 2008 et 2009. Une  autre agression naturelle, et cette forteresse ne sera qu’un amas de  terre rouge et de tronc de palmiers. Une halte devant une habitation  avec un premier étage sur support de palmiers nous laisse perplexe.  C’est comme un gué de sentinelle placé devant l’une des six portes du  ksar. Moghrar a un charme, c’est celui de son merveilleux ksar.  
La piscine naturelle de kalaâ Cheikh Bouamama   A quelques encablures de Moghrar se trouve la kalaâ Cheikh Bouamama,  haut lieu de lutte et de résistance contre le colonialisme. On longe  l’oasis qui abrite l’oued, et pas moins de 20 000 palmiers sur une  superficie de 40 ha. Sur le flanc gauche, s’élève un musée d’histoire  protégeant des collections allant de la période préhistorique, en  passant par l’épopée de Cheikh Bouamama, personnalité incontournable de  l’histoire algérienne, jusqu’à la guerre de libération, ainsi que des  collections d’artisanat. Ce qui est surprenant, c’est cette sorte de  tunnel sur le côté droit de l’entrée du musée. On s’engouffre dans une  espèce de couloir, on descend dix mètres, vingt, on sent la fraîcheur  nous envahir. Encore quelques mètres et on débouche sur une espèce de  lac ; une piscine naturelle avec plein de poissons de la taille d’un  bras d’un adulte. Un faisceau lumineux naturel joue le rôle de  projecteur.   Entre deux roches pénètre un rayon de soleil, le spectacle est sublime  dans ces entrailles humides où la température descend modérément. Les  enfants de kalaâ Cheikh Bouamama sont bénis, ils ont leur bassin pour  nager et se rafraîchir. Pour la légende, un vieux qui nous faisait  office de guide nous informa que cette étendue d’eau souterraine porte  le nom de Sidi Bahous El Hadj. C’était un illustre homme religieux et de  savoir qui a reçu les habitants de cette contrée venus l’implorer pour  trouver une solution à leur culture et palmiers victimes d’une forte  sécheresse. L’homme sage et de foi leur indiqua de suivre sa jument et  là où elle s’arrête, ils devraient creuser. L’eau jaillit de la terre et  les poissons avec. Depuis, elle ne s’est jamais tarie pour le bien de  ses gens qui ne vivent que des produits de leur agriculture. Pour être  sincère, il faut avouer que ce lieu paradisiaque, sous d’autres cieux,  ferait des merveilles, il serait une très importante vanne touristique  pour la localité. Sans franchir nos frontières et sans chercher le  touriste étranger, posons-nous une question : combien d’Algériens ont  visité ce lieu